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L'Antsingy du Bemaraha traversé par le fleuve Manombolo - imagerie Google earth |
Il existe à Madagascar
des formes particulièrement spectaculaires de pinacles en forme de lames aiguës pouvant atteindre de 10 à 60
mètres de hauteur : ce sont les tsingy, terme passé dans le vocabulaire international de la géomorphologie. Ils se développent dans des calcaires
massifs épais de plusieurs mètres. Il semble s'agir de crypto-formes. Elles peuvent s'organiser en ensembles de plusieurs kilomètres carrés comme c'est le cas dans l'Antsingy du Bemaraha, celui de Namoroka ou celui de l'Ankarana. Les trois sont classés en aires protégées.
Le
causse de Bemaraha (traduction : "très rugueux") qui s'étend sur environ 250 km du Nord au Sud, présente un immense secteur de tsingy et de forêt. On trouve les tsingy sur la bordure occidentale du causse ce qui
implique de faibles dénivelées (60 mètres maximum). Les secteurs les plus
spectaculaires se situent dans la partie méridionale : des arbres
gigantesques partis du fond des couloirs ou accrochés au flanc des tsingy s'épanouissent au-dessus des
rochers. Ceux-ci sont eux-mêmes colonisés par la forêt dense sèche.
Les tsingy s'organisent en massifs linéaires de largeur variable, séparés par des kitsy (couloirs étroits) et des tatatra (couloirs larges) de largeur également
variable (de quelques décimètres à quelques dizaines de mètres) de différents
types : à fond rocheux ou obstrués par des éboulis (rakorako) ou de gros
blocs, peu ou non végétalisés ; à fond humifère ou argileux le plus souvent
couvert de végétation (baihibohonala). Le fond des kitsy est souvent encombré de gros blocs rocheux et ils sont
souvent obturés à leurs deux extrémités par des murailles calcaires, comme dans
le cas du réseau Ming.
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Tsingy dans le Bemaraha |
Cependant les pans de roche sont percés de gigantesques
porches étagés correspondant à d'anciennes galeries. Celles-ci ont été utilisées
par l'homme à diverses époques. J.C. Dobrilla a confirmé la présence de
peintures murales, notamment de mains en négatif. Il a découvert de nouveaux
sites de sépultures beaucoup plus importants et mieux conservés que ceux des
gorges du Manombolo. Dans la plupart des grottes dotées de points d'eau, on
note un amoncellement de tessons de poteries, voire de porcelaine chinoise, et
parfois des traces d'habitat. Il y a lieu de penser que s'y est
retranchée une population vazimba autochtone avant même l'arrivée des Sakalava. La
conquête française qui y fût tardive (1906) poussa de nombreuses familles
réfractaires à l'impôt à se réfugier dans quelques unes des innombrables grottes. Aujourd'hui
encore, l'Antsingy est le refuge de dahalo voleurs de zébus.
Les flancs des tsingy sont striés de cannelures et cariés
d'alvéoles. Quelques Pachypodium et Lomatophyllum
s'y accrochent parfois, ainsi que des Ficus.
La
pénombre, la fraîcheur et l'humidité qui prévalent au fond de ces couloirs explique la présence
occasionnelle d'une forêt subhumide comportant notamment plusieurs espèces de Pandanus et des fougères. Les lianes
sont nombreuses, de même que les arbres établis sur les flancs rocheux capables
de lancer leurs racines plusieurs mètres en contrebas vers le fond des
couloirs.
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L'Antsingy du Bemaraha vu sur Google earth |